Le 23 janvier, j’ouvre ma page Facebook et le fou rire commence. Minutebuzz a posté une vidéo sur DailyMotion, du style Upworthy. Upworthy, je vous invite à vous promener sur ce site, est une merveille du web. Des titres catchy, des histoires qui font chialer, du contenu très visuel : tout ce que le débile de base (internaute, mobinaute, vous, moi) adore consommer sur le web. L’histoire : “Par amour il fait 8500km pour passer 48 heures avec sa petite amie”.
On pourrait juste en rire. Sauf que… Là, c’est Coca Cola France qui est impliqué dans un cas de bad buzz avec MinuteBuzz.
Je me suis amusé à imaginer un dialogue dans les locaux de MinuteBuzz, pour savoir comment ils avaient décidé de plagier Casey Neistat et faire un bon buzz pour #DRDC, le hashtag de Coca-Cola.
Pour comprendre l’histoire : Coca-Cola paye MinuteBuzz pour de la création de contenu (mon job, le brand content, le contenu de marque). Coca-Cola donne des sous à des gens pour écrire des articles qui vont être partagés. L’objectif : qu’un maximum de personnes passent un bon moment, ressentent une bonne émotion, qui restera associée à Coca-Cola et son opération “Des raisons d’y croire” #DRDC.
“- Faut faire du cash, faut faire du cash… On vend du native advertising maintenant, il faut faire du cash !
– Qu’est-ce qu’on peut vendre à Coca, là, on n’a plus d’idées neuves.
(Rires enregistrés de la salle)
– Attends, tu te souviens, y’a un mec qui a buzzé récemment, là, pour la sortie de Walter Mitty… Casey Neistat ! Ça te dit qu’on repompe l’idée et qu’on fasse une vidéo humanitaire nous aussi ?
– De l’humanitaire ? Tu nous as pris pour une ONG ? (regards caméras)
(Rires enregistrés)
– Ah tiens regarde, j’ai mieux : sur sa chaîne Youtube, il a aussi fait du boobs. Ça vend toujours le cul, non ?
– Ouais, « sex sells » ! Et y’a aussi du couple dedans ? Vazy, fais voir ? Parfait ! Les bolosses vont cliquer, les petites meufs aussi parce qu’il surprend sa copine, c’est trop cute.
-Ok, on va vendre de la happiness !
– Allô CocaCola ? On a une idée de native advertising pour vous ! Bon, on ne l’a pas créé, on vole une idée d’un créatif ricain, mais on est Français, on s’en bat les c***, on fait du web français, il ne le saura jamais de toute façon Casey Neistat !
– Kewa ? C’est du web, on vous fait confiance, c’est vous les experts du buzz ! Vous n’oseriez pas nous proposer du contenu de marque, à nous COCA-COLA, sur lequel on pourrait nous faire des reproches, non ?
– Nooooooooon…”
Quelques semaines plus tard, sur le web français : BOOOOOOOM !
Par amour, il fait 8500km pour passer 48 heures… par minutebuzz
Alors est-ce que ça ressemble à la vidéo originale ? A vous de juger.
Est-ce que ce contenu à la Upworthy qu’on trouve partout en ce moment me dégoûte ? Oui, mais ça fait du clic.
Voyant cela, les pros du web ricanent doucement. On le sait, on nous prend pour des cons avec une telle vidéo. Mais en fait, on n’est simplement pas le public visé.
Malgré le sous-titrage en anglais (« think global » !), la vidéo vise un marché français de tweens (entre 10 et 12 ans, ne parlant pas anglais). Allez, jusqu’à 25 ans peut-être. Soyons large, les sujets racoleurs et cute parlent à tout le monde.
Le problème dans toutes ces histoires de plagiat, au fond, c’est ma jalousie. Je m’en veux terriblement de ne pas voler les marques avec autant de légèreté. Ça a l’air si facile… Faire un bad buzz, faire le buzz, au fond, l’essentiel, c’est qu’on parle d’eux, non ?
Tout ça pour en arriver à la conclusion : en cas de plagiat, d’erreurs, ayez recours à une bonne com’ de crise !
Une fois l’imposture démasquée :
1/ Reconnaissez votre erreur. Mea culpa. (Ils pourraient dire “Pardon Casey Neistat. On n’aurait pas dû te voler ton idée et la vendre à Coca-Cola France.)
2/ Expliquez que vous allez améliorer vos process pour que ce genre d’erreurs ne se reproduise plus.
3/ Appliquez une politique de plus grande transparence.
Et pourtant, dans tous les cas de plagiat un peu médiatisés (Arthur qui plagie Craig Ferguson, Canal+ qui plagie « Meanwhile / Pendant ce temps-là dans un autre univers »), on assiste aux mêmes erreurs :
1/ Pardon ? Quoi pardon ? Pourquoi pardon ? Fuck you, oui !
2/ Ah merde ! Je suis vraiment démasqué ? Bon… On n’a qu’à dire que… C’était un hommage ! Voilà, on va s’en sortir avec ça ! C’était un hommage bonhomme que je plagie, regarde ! Tu apprécies l’hommage ? Tu apprécies bien le bruit du cash dans mes poches fait grâce à tes idées ?
3/ Le public n’a pas de cerveau, vous pouvez donc reprendre votre activité sans être inquiété.
Pour Coca-Cola et son #DRDC, qui sont partenaires de l’opération, c’est l’équivalent d’un kilo de sucre supplémentaire dans leur merde : qui s’en soucie ? Mince… J’ai écrit l’article à 16 heures, et à 19 heures voici Casey Neistat, réveillé aux Etats-Unis, qui prend conscience du bad buzz Coca-Cola MinuteBuzz. Je vous conseille de scruter son compte twitter… parce qu’une fois que cette histoire sera oubliée, LUI sera toujours créatif.
Vive le web, vive la création, bisous. Vraiment désolé pour la qualité des images, je verrai ce week-end si je peux les améliorer, là j’écris un bouquin !
Pour en savoir plus : lire les réactions de Casey Neistat sur le plagiat
et l’analyse de Lily Ponthieux sur le cas Coca-Cola*MinuteBuzz contre Casey Neistat
Sélim